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Versatilité insidieuse
du sentiment imparable
dans le désordre journalier
de l’ondée répétitive
et des rats musqués
embrayant au quart de tour
sur des roues déjantées
leur course fébrile
au travers des rues où le bitume
devient posture posthume
si la glisse est trop forte pour une moto
perdant la ligne d’horizon obscurci
d’un caillot qui monte au front comme en 14
on n’entend plus que les canons de 75
(pas le département)
le Samu est prévenu
il en faudrait à tous les carrefours
le ciel s’assombrit en virevoltant
l’arc électrique se tend comme l’arc-en-ciel
mais de manière secouante
qui a jamais vu l’éclair EDF
lui passer près de la figure étonnée
nous ne sommes pas à l’abri
d’un phénomène naturel
et pas encore du tsunami de la Seine
le zouave de l’Alma se tient coi
la déferlante Charlie va se calmer
les péniches repassent sous les ponts
les chemises boutonnées de nacre
avec leurs cols à manger de la tarte
les mannequins défilent
au pas de l’oie blanche
sur des podiums en plancher blond
les filles montrent leurs jambes de miel
le couturier n’a pas un nom français
il fait penser à l’éditeur Éric Losfeld
(terrain vague)
dénicheur de talents hors normes
dans la marge et dans les bas-côtés
avec quelques écrivains rares
considérés comme des moins que rien
face à l’empire des mensonges
des traites et des esclaves
quand ils n’ont pas encore quitté l’île de Gorée
ils sont doués pour le rythme et
la course à pied et la boxe
ils joueront aussi de la trompette
et du saxo
ils ont la cage thoracique plus développée
c’est facile pour eux
mais en peinture à part Jean-Michel Basquiat
vous en voyez beaucoup des peintres de couleur
je ne parle pas de Pierre Soulages
et de ses aplats ses éclats ses méplats
ses couteaux jamais sanglants
c’est une fine lame il doit tenir le cap
avec sa lampe torche intérieure
il sait que le tunnel est au bout de la route
l’estimation a remplacé l’estime
l’objurgation l’escrime
l’appréhension l’intime
l’abomination le crime
tandis que les caméras des télés instantanées
fouillent les ombres cachées des terroristes
sur des vidéos de RER
de métro ou d’aéroports
il faut débusquer le détail
le mince indice la parole esseulée
la pensée échappée
la phrase envolée
mais un dessin s’est transformé en destin
un croquis en dernier cri
un sourire en soupir
un avenir en souvenir
fabriqué en pierre tombale
l’homme qui marche pourtant allongé
traverse soudain le marbre gris
Alberto Giacometti l’encourage alors
de son trait fin qu’il reproduit
inlassablement
dans l’air encore chargé de poudre