Mercredi dernier, Arte a diffusé l’avant-dernier film d’Hayao Miyazaki, Ponyo sur la falaise (2008) dans lequel un tsunami est montré de manière prémonitoire.
Hier, j’ai vu Le Vent se lève, annoncé comme son film-testament et dans lequel le cinéaste japonais semble rassembler les thèmes qui l’ont toujours captivé : le jeu des éléments naturels, les interventions du fantastique, les combats, la passion, le futur.
Mais c’est surtout le trait, le dessin qui ensorcellent : une « animation » qui dépasse la simple « BD » mise sur écran, un univers spécifique où la création, l’invention, la multiplicité des personnages, la beauté ou le réalisme des décors font oublier qu’il ne s’agit pas d’un film avec de « vrais » personnages puisque l’on croit totalement à leur existence.
Miyazaki, à partir de l’histoire vraie d’un ingénieur en aéronautique (le concepteur du fameux avion appelé Zéro et qui fut lancé notamment sur Pearl Harbor avec des pilotes kamikazes), imagine son héros traversant les années, depuis 1920 jusqu’à l’aube de la seconde guerre mondiale, avec le tremblement de terre du Kantô en 1923 et la rencontre de celle qui deviendra sa femme, prise dans une situation tragique.
Il paraît que le film a déclenché une controverse à la fois au Japon et aux USA, ces derniers n’ayant pas apprécié que l’on fume autant dans cette histoire : bientôt Humphrey Bogart se verra supprimer, rétroactivement, ses cigarettes plus dangereuses au cinéma que le napalm et le défoliant balancés lors de la guerre du Vietnam.
Même Le Monde prend l’œuvre avec des pincettes et l’un de ses critiques, Jacques Mandelbaum (article réservé aux abonnés), émet un certain nombre de reproches envers Miyazaki qui paraissent quelque peu infondés au regard du dessein de la démarche du cinéaste.
Durant toute la durée du film Le Vent se lève (agréable d’entendre prononcer ce vers de Paul Valéry en français avec l’accent japonais), on est saisi par l’impériale beauté du trait – une ligne claire dans le ciel – et l’art qui dessine et isole la moindre image, celle d’un individu ou d’une foule, d’un train ou d’un bombardier, d’un incendie ou de la pluie, d’un avion de papier ou des yeux profonds qui laissent échapper quelques larmes.
Le dernier film de Miyazaki est plié en origami et ceci pour mieux planer dans notre mémoire.
(Météo après le ciné quai de Seine, hier, 15:51. Photo : agrandir.)