La main aquatique

Chômage1_DH(Photo prise le 8 janvier. Cliquer pour agrandir.)

« Alors l’espace est déhiscent, il s’ouvre de toutes parts ; il faut le saisir dans cette « ouverture » qui est maintenant la pure possibilité de toutes les formes à créer. En fait, l’espace onirique de l’aube est changé par une soudaine lumière intime. L’être qui a fait son devoir de bon sommeil a soudain un regard qui aime la ligne droite et une main qui fortifie tout ce qui est droit. C’est le jour qui point à partir même de l’être qui se réveille. A l’imagination de la concentration a fait place une volonté d’irradiation. »

Gaston Bachelard, Le Droit de rêver, PUF, 1970 (pages 199-200).

Avant que toute l’eau ne soit retirée, dans le canal en « chômage » (à rajouter dans les stats de l’Agence pour l’emploi), elle flottait là, mercredi dernier, comme pour un appel au secours.

J’aurais pu descendre avec des bottes ou lui lancer une bouée. Personne ne semblait s’en soucier, je n’entendais aucun « pin-pon » à la ronde. Un dernier signe avant de disparaître corps et biens – d’autres l’attendaient au fond, des chariots de supermarché, des Vélib’ en pagaille, des scooters, une grosse moto embourbée vers le pont de la rue Louis-Blanc (10e) – comme un appel dans le vide des regards ou des sons masqués par les casques audio des promeneurs attirés par cette brocante imprévue.

À la main aquatique, il manquait un doigt : elle attendait peut-être juste un coup de pouce.

Chômage2_DH(Photo prise le 6 janvier. Cliquer pour agrandir.)

Tagué , ,

24 réflexions sur “La main aquatique

  1. brigetoun dit :

    merci pour la poésie de la photo, de Bachelard et de vous

  2. gballand dit :

    Ne jamais saisir les mains qui se tendent : elles peuvent vous faire sombrer 😉

  3. Alex dit :

    Sans son vêtement d’eau, le canal est tout nu, le quartier du canal est tout nu, et l’on voit apparaître tous les défauts cachés des riverains…

  4. Arlette A dit :

    Me doutais de vous retrouver ici devant cette béance de nos noirceurs abandonnées

  5. Plus possible de sombrer ni même de flotter entre deux eaux, les suicidaires devront marcher jusqu’à la Seine.
    J’ai du mal à comprendre pourquoi on y trouve autant de vélib !

  6. Anna2B dit :

    Oh !!!
    Qu’aurait imaginé Simenon à partir de cette main là ? l’inconnue du canal St Martin ?…

  7. Francesca dit :

    « Atmosphère, atmosphère… »

  8. Aunryz dit :

    Oui
    la photographie donne

    un paysage urbain à la puissance renouvelée par cette terre qui émerge.

    avec ce qui sera pêché
    y aura-t-il de quoi faire une brocante sur les berges prochainement ?

  9. Un gant qui fait rêvasser…

  10. Zoë Lucider dit :

    Une ménagère exténuée aura jeté le gant avant de partir en voyage vers d’autres horizons. 🙂

  11. […] de pêche délivrée par l’AAPPM… la Brême » moi en urbain, je pense à cet article du Chasse-clou (je reste un humain essentiellement local comme on voit) certes daté du dimanche, […]

  12. @ PdB : merci pour ton commentaire en forme de « ping » (ça change) !

  13. @ PdB : bien reçu le « pong ». 😉

Laisser un commentaire